26 Février 2013
Talent, succès...Voilà un sujet préoccupant quand on est, ou quand on se croit, artiste. J'y réfléchis depuis longtemps et m'apprêtais à publier quelques petits textes à ce propos. Et voici que tombe à pic une anecdote, qui m'a été soufflée par Yves Lympalair et que je recopie, comme lui, sur Wikipédia. Comme nous sommes au lendemain des 20èmes Victoires de la musique classique. Pour comprendre il faut commencer par regarder cette vidéo :
Désolé: la vidéo a été retirée ! Explication : le 12 janvier 2007 Joshua Bell (célèbre violoniste, que je ne connaissais pas, et que je vous laisse découvrir par ce lien) a participé à une expérience menée par The Washington Post à une heure de pointe, le matin, dans le hall d'une station de métro à Washington. Cet événement a été organisé par le journal dans le cadre d'une "expérience de psychologie comportementale sur la perception, les goûts et les priorités" (évidemment, dit comme ça, ça fait chic et on se dit que c'est du sérieux !).
Joshua Bell a ainsi joué trois quarts d'heure et a pu récolter 32 dollars pour un total de sept personnes seulement qui se sont arrêtées un instant pour l'écouter jouer, et sans compter les 20 dollars laissés par l'unique personne l'ayant reconnu. Donc disons 12 piasses comme ils disent au Québec.
Le point-clé de cette expérience apparut lorsqu'il eut fini de jouer. En effet, il n'y eut aucune réaction, aucun applaudissement. Une seule personne l'avait reconnu. Personne ne savait que ce violoniste était célèbre, et qu'il venait de jouer sur un Stradivarius célèbre de 1713, le Gibson ex-Huberman, acheté par le violoniste quelques années auparavant 3,5 millions de dollars, ni que deux jours auparavant il avait joué au théâtre de Boston à guichets fermés pour des spectateurs qui avaient payé leur place jusqu'à 100 dollars.
La conclusion du journaliste revient à se demander : « Dans un environnement ordinaire, à une heure inappropriée, sommes-nous capables de percevoir la beauté, de nous arrêter pour l'apprécier, de reconnaître le talent dans un contexte inattendu ? » Cette expérience et surtout l'article qui fut publié valurent à son auteur, le journaliste Gene Weingarten, un Prix Pulitzer en 2008.
Quel talent il a ce journaliste !